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Immobilier durable : 5 solutions pour relever le défi de la rénovation

Il devient urgent de décarboner l'immobilier et d'accroître sa résilience face aux défis climatiques. Mesurer autrement la valeur, la clé pour un immobilier durable ?

20 avril 2023
Contributors:
  • Walid Goudiard

Alors que les villes s'engagent partout dans le monde à atteindre d’ambitieux objectifs zéro carbone, il devient désormais urgent de décarboner l'immobilier et d'accroître sa résilience face aux défis climatiques. 

Près de 80 % du parc immobilier de 2050 existe déjà. Signe qu’il est temps pour les pouvoirs publics et les acteurs de l'immobilier d’intensifier leurs efforts de modernisation du bâti. 

Aujourd’hui, les entreprises du secteur immobilier sont confrontées à un labyrinthe réglementaire, trop de normes hétérogènes et pas assez de bonnes pratiques sur lesquelles s’appuyer. Ceci d’autant plus que la création de valeur nécessite de prendre en compte une grande diversité d’enjeux et d’agendas environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). 

Au sein des équipes JLL Project and Development Services, nous aidons les organisations à naviguer dans cet univers complexe. Nous nous attachons à définir les leviers de transformation d’un actif afin qu’il contribue non seulement à améliorer la qualité de vie de ses occupants, quel que soit son usage, mais également à générer un impact positif pour son environnement.

Voici cinq solutions capables de relever, dès aujourd’hui, les multiples défis d’une rénovation immobilière vertueuse.

1- Intégrer des critères extra-financiers dans l'évaluation de la performance et dans la valorisation des bâtiments

Les normes de transparence en matière d'émission de gaz à effet de serre (GES), telles que la Science-Based Targets initiative (SBTi) et le Carbon Risk Real Estate Monitor (CRREM), soulignent la nécessité de s'attaquer aux émissions directes et indirectes. Si elles répondent à des attentes croissantes de la part des collaborateurs, des citoyens et des consommateurs en matière de politique RSE, elles poussent également à rechercher des immeubles répondant à des standards toujours plus élevés en matière de développement durable.

Or, depuis des décennies, le secteur de l'immobilier raisonne sur la base de deux critères prépondérants : la surface (m²) et la valeur (euros). Le tout premier défi consiste donc à faire évoluer la manière de mesurer la création de valeur.

Pour s’assurer d’avoir des biens compétitifs et durables, nous devons intégrer des paramètres extra-financiers dans l'évaluation de la performance des actifs, et ce de manière normée. Les stratégies de rénovation doivent à la fois identifier les actions permettant d’améliorer l'efficacité énergétique et la résilience climatique des bâtiments, et définir la manière dont l’atteinte de ces objectifs sera mesurée, notamment en proposant de nouvelles métriques. Nous pouvons très bien imaginer aujourd’hui que la valorisation d’un actif intègre les mètres carrés d’espaces végétalisés, le nombre de kilos de CO² émis par mètre carré ou bien des critères liés à la biodiversité.

Pour les parties prenantes, ce changement majeur de perspective nécessite d’investir dans la conduite du changement et dans les compétences ESG des collaborateurs.

2- Refléter le nouveau paradigme de valeur dans la structure des baux

Le green premium existe : les immeubles ayant des émissions de GES faibles, limitant les déchets et les consommations de ressources naturelles atteignent un taux d’occupation et un niveau de satisfaction des occupants plus élevé. Les propriétaires et locataires avertis reconnaissent que la liquidité du marché et le prix des biens immobiliers sont de plus en plus influencés par leur niveau d’émissions de GES.  La décarbonation des actifs existants est donc essentielle pour éviter qu’ils ne soient catégorisés comme actifs bruns, et ne perdent ainsi de leur valeur.

Compte tenu de la pénurie aiguë de bâtiments zéro carbone, les premiers propriétaires à rénover leurs actifs auront le triple avantage de pouvoir revoir leurs loyers à la hausse, réduire leur risque financier et accéder à des capitaux au meilleur taux. Tout en retenant ou en attirant plus facilement de nouveaux locataires.

Le moment est opportun pour repenser la manière dont nous structurons les baux commerciaux et professionnels afin à la fois de partager la responsabilité des travaux de rénovation, et de bénéficier des externalités positives de la mise en œuvre d’actions à impact social et environnemental.

Ainsi, les baux peuvent intégrer des clauses relatives à des actions ESG attendues, indexant par exemple les loyers à l’atteinte d’objectifs extra-financiers par les propriétaires et par les occupants.

3- Utiliser les normes de reporting volontaire pour guider les rénovations vertes

De nouvelles législations telles que la Taxonomie verte de l'Union Européenne ou le règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers  poussent pour une accélération de  la rénovation des biens immobiliers. En parallèle, les pratiques de marché émergent comme  un cadre solide pour engager des rénovations ambitieuses du point de vue énergétique.

Les normes de reporting reconnues au niveau international, telles que le SBTi sont adoptées de plus en plus largement, et contribuent à aider l’ensemble des acteurs de notre industrie à définir des stratégies de rénovation immobilière ambitieuses, en ligne avec les objectifs de durabilité de nos clients.  

4- Prendre en compte l’empreinte carbone d’un actif immobilier sur toute sa durée de vie

Le réchauffement de la planète, et notamment de l’Europe, exige que l'on s’intéresse davantage à la résilience des bâtiments dans un contexte de risques climatiques accrus. Pour être zéro carbone, un programme immobilier doit prendre en compte le CO² émis non seulement lors de l’utilisation des bâtiments (émissions opérationnelles), mais aussi lors de sa construction et de la production des matériaux (émissions incorporées).

Pour réduire l’empreinte carbone tout au long du cycle de vie du bien, les stratégies de rénovation doivent limiter les démolitions et recourir à un aménagement intérieur frugal, en réutilisant et recyclant autant que possible. Les matériaux de construction à faible teneur en carbone et biosourcés font partie des alternatives les plus durables.

Les rénovations doivent également augmenter l'intensité d'utilisation des bâtiments. Par exemple, les bureaux et parkings, généralement vides la nuit, peuvent être réaménagés pour permettre des activités annexes après les heures de travail.

Enfin, certains outils technologiques tels que des capteurs ou des outils de gestion prédictive des bâtiments, peuvent aider à identifier et réaliser le potentiel d'optimisation des espaces. Le but est de concevoir des lieux qui offrent davantage aux utilisateurs tout en maximisant l'utilisation du parc immobilier existant.

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5- Former des partenariats public-privé et partager les bonnes pratiques de rénovation verte

Pour que l’immobilier contribue à une fabrique de la ville durable et à la qualité de vie de ses habitants, la collaboration entre les pouvoirs publics et le secteur privé est essentielle. Il en va de même des initiatives de partage des expertises et de financement de la transition.

À Paris, la révision actuelle du PLU visant à l’élaboration du premier PLU bioclimatique au monde s’est appuyée sur une consultation publique des sociétés immobilières, afin qu’elles partagent de quelle manière elles intègrent leurs stratégies ESG dans leurs programmes de développement. Des méthodes de collaboration similaires sont également employées en Allemagne et au Royaume-Uni.

Une approche holistique – réunissant locataires, propriétaires, investisseurs, promoteurs et secteur public – est essentielle à la réussite de cette démarche, et nous pensons qu'elle deviendra bientôt la norme. La capacité des parties prenantes des sphères publiques et privées à travailler ensemble pour développer des stratégies de rénovation verte contribuera à créer une valeur immobilière durable et résiliente pour les villes et leurs habitants.  Cette collaboration doit être associée à l’intégration de démarches durables telles que le réemploi des matériaux ou l’adoption d’une économie circulaire, et qui doivent être placées au cœur de nos activités.

Alors que la crise climatique s'intensifie, la priorité est que nous travaillions tous ensemble et que nous couplons nos efforts pour relever un défi bien trop grand pour être surmonté en ordre dispersé. 

Contactez Charlotte Degoulet

Directrice Conseil en développement